Le chef de Mouvement Montréal, candidat à la mairie de Montréal vient – un peu comme il en a pris l’habitude ces derniers temps – de jeter un nouveau pavé à la mare. Un mauvais pavé. Encore ! Avons-nous envie d’ajouter.
En promettant de tenir « une consultation d’un an de l’OCPM sur l’utilisation des langues anglaise et française au sein des institutions publiques et privées, suivie d’un référendum sur le statut linguistique de Montréal « , Balarama Holness vient encore de démontrer que sa quête personnelle passe au-dessus de l’intérêt général, mais surtout qu’il est un un mauvais stratège politique.
Il serait erroné pour lui de croire que celles et ceux qui l’ont fait connaître, porté et soutenu pour obtenir de l’OCPM une consultation publique sur le racisme et la discrimination systémique le suivront encore une fois sur ce chemin… dangereux.
Et pour cause.
Après son échec aux municipales en 2017 à Montréal-nord, l’ex-sociétaire des Alouettes est parti en croisade contre Valérie Plante, cheffe de Projet Montréal et actuelle mairesse. Balarama Holness a décidé de « dénicher le racisme systémique qui se cachait dans les murs de l’Hotel de Ville« . Soutenu par des organismes et plusieurs centaines de gens, pour la grande majorité, des personnes racisées, la pétition lancée a abouti à la tenue d’une consultation sur le racisme et la discrimination systémique à Montréal. Des recommandations ont été faites, notamment pour la Ville, l’amenant à prendre des mesures adéquates. Balarama Holness a pu obtenir ce qu’il voulait : notoriété et visibilité.
Quelque temps après, c’était un secret de polichinelle que Balarama Holness se présenterait aux élections. On l’attendait comme candidat-vedette dans un parti existant… Alors que des tractations existaient entre quelques prétendants, parmi lesquels lui, pour former une troisième force à opposer à Projet Montréal et Ensemble Montréal, il a préféré fonder son propre parti où il serait le Chef. C’est ainsi qu’est né Mouvement Montréal. L’intérêt et la sympathie pour ce parti ont commencé à s’étioler lorsqu’on s’est rendu compte que le Chef de Mouvement Montréal, était mû par d’autres objectifs que le slogan » les gens avant la politique ».
Et rien de mieux que ce qui s’est passé à Montréal-nord. Comment expliquer qu’un homme qui doit sa visibilité et sa présence dans l’espace public au soutien sans faille d’une large frange de la communauté noire de Montréal, ait pu agir comme il l’a fait, soit « placer » un candidat pour la mairie de Montréal-nord contre Will Prosper ? Au plus fort de « l’affaire Will Prosper« , alors que la majorité des gens ont été émus et ont réagi, face à l’acharnement médiatique et politique que le fondateur de Hoodstock subissait, Balarama Holness a posé, non pas un geste de rassemblement, de solidarité… mais plutôt un geste de division.
Inutile de revenir sur la décision d’unir les deux partis, le sien et Ralliement Montréal de Marc-Antoine Desjardins. Au sein de Mouvement Montréal, plusieurs candidats interrogés sont soit mal à l’aise à y répondre, mais en insistant, quelques courageux affirment l’avoir découvert le même jours. Un autre indicatif du mode de gouvernance.
Et en ce qui concerne sa dernière sortie, il faut être un mauvais stratège, mais aussi un politique sans vision, pour amener la question linguistique, ou plus exactement remettre en question l’essence linguistique de Montréal, en tant que ville francophone, particulièrement en cette période. Une période tendue pour diverses raisons. Cette très mauvaise idée de celui qui se considère – et se rêve – comme le « Obama canadien » (*) va inévitablement avoir des conséquences désastreuses pour le vivre-ensemble montréalais. . Au-delà des divisions que cela va créer entre francophones et anglophones montréalais, d’une part, ce sont les allophones – les neoquébécoises et neoquébécoises – qui seront encore stigmatisés – déjà que certains leur mettent sur le dos le fameux « recul » du français dans la métropole -. C’est en eux qu’on va trouver les bouc-émissaires de tous les problèmes auxquels la ville doit faire.
Mais d’autre part, cette idée populiste va mettre à mal le travail de nombreux organismes et personnes qui se battent depuis des années pour une ville inclusive. Une ville dans laquelle toutes les composantes sociologiques peuvent et doivent être prises en compte. En mettant en avant des enjeux qui exacerbent les divisions, l’aspirant-maire joue sa carte personnelle. Et non, celles des Montréalaises et Montréalais, des neoquébécoises et neoquébécois qu’il prétend représenter.
Balarama Holness a tort. Pour un homme qui aspire à être le premier magistrat de la Ville, il y a de quoi s’interroger sur ses capacités à rassembler, à administrer la Ville au bénéfice de toutes les Montréalaises et de tous les Montréalais.
(c) Cyrille Ekwalla – Octobre 2021