Le 16 mai dernier, le gouvernement fédéral annonçait en grande pompe le financement du Centre culturel afro-canadien de Montréal (CCAM)(1). Il soulignait que ce projet s’inscrivait dans le cadre de la première décennie sur les personnes d’ascendance africaine (2).
Allen Alexander, directeur général du CCAM, rappelait que près de 12 % de la population montréalaise sont de personnes d’ascendance africaine.
L’objectif du CCAM est de reconnaitre et de célébrer l’héritage des personnes noires ainsi que leurs contributions à la société. Cet objectif coïncide avec les priorités énoncées lors de la troisième session de l’Instance permanente sur les personnes d’ascendance africaine (Instance). L’instance rappelait l’importance de la richesse culturelle des communautés d’ascendance africaine ainsi que la nécessité « de favoriser la protection de leur patrimoine culturel et de leur liberté d’expression, ainsi que de valider leurs contributions substantielles aux sociétés ».
C’est ainsi que ce projet veut dynamiser le tissu social en exposant la richesse et la diversité des cultures des personnes d’ascendance africaine. Il permet, comme le suggère l’Instance, de souligner « que les histoires de ces communautés ont eu et continuent d’avoir une influence importante sur les sociétés. ».
Pendant des siècles, la culture des peuples afro-descendants a été effacée, ce qui a eu des conséquences négatives. On peut penser aux hauts taux de pauvreté chez les Noir.es, pauvreté qui est souvent intergénérationnelle. De surcroit, les femmes d’ascendance africaine sont financièrement plus vulnérables, ce qui s’observe par un manque d’opportunités économiques , facteur ayant des effets sur l’autonomie de ces femmes noires.
Ce centre permettra également Une valorisation de la présence de migrants. Selon l’Instance, « les migrants d’ascendance africaine sont parfois perçus comme une menace pour l’identité culturelle de leur pays d’accueil. »
Ultimement, ce projet permettra d’écrire une histoire inclusive en corrigeant les oublis mémoriels exposant notre histoire nationale pluri-phonique. L’histoire du Québec est constituée non seulement de celle des descendants des colons français, mais aussi de celle des Premières Nations comme nous le rappelle la Commission de vérité et réconciliation (4) (voir l’appel à l’action 67). Ce récit national est celui de personnes de différents horizons, dont les personnes noires, dont la première présence en sol canadien est celle d’Olivier Lejeune en 1633.
Ainsi, la contribution du CCAM participera au dévoilement d’un récit historique qui ne peut qu’« aider les sociétés à devenir plus inclusives et les personnes d’ascendance africaine à développer un sentiment positif d’elles-mêmes ainsi qu’ un sentiment d’appartenance sociale, qui sont des éléments essentiels à leur bien-être psychologique et émotionnel» , selon l’Instance.
Ce récit permettra une meilleure compréhension de la réalité sociale de l’Autre. Comme le décrivait la professeure Sherene Razack : « Sans histoire et sans contexte social, chaque rencontre entre groupes inégaux en devient une nouvelle interaction, où les participants partent de zéro, d’un être humain à l’autre, chacun innocent de la
subordination des autres . »
Reconnaissant cet état de fait, le gouvernement fédéral et le directeur général du centre sont d’avis que le CCAM permet de lutter contre le racisme systémique afin de permettre une véritable diversité sociale. Tout en favorisant, selon le gouvernement fédéral, une émancipation des personnes noires de l’ensemble du pays.
Ainsi, une meilleure compréhension de la culture et de l’histoire permettra de bâtir un meilleur futur pour l’ensemble des Montréalais.es, Québecois.es et Canadien.es.
(2) https://www.un.org/fr/observances/decade-people-african-descent
(4) https://nctr.ca/wp-content/uploads/2021/04/4-Appels_a_l-Action_French.pdf
(c) Me Tamara Thermitus (Avocate émérite et titulaire d’une maîtrise en droit de la faculté de droit de l’Université McGill, où elle est actuellement Boulton Senior Fellow. Elle a négocié les termes de la Commission de vérité et réconciliation du Canada.)